Wilhelm frappait son revolver contre la crosse de son fusil pour dégager la poussière qui s’était incrusté dans son arme. Cela faisait 2 semaines qu’il marchait dans le désert sans rencontrer âme qui vive, la chaleur était harassante de jour comme de nuit, le sable était partout, dans ses bottes, dans sa combinaison, dans les cheveux de sa sœur. Sa seule joie avait été de ne pas voir le compteur Geiger s’affoler lors de leur exil.

« Et c’est ça qu’ils appelaient l’hiver nucléaire.. » Laura but une gorgée d’eau et laissa tomber sa gourde.

« Une de plus.. » Elle sortit leur paire de jumelle, acquise dans le bureau du dirigeant de l’abri et scruta les alentours.
« Enfin.. » Elle les tendit à son frère et se blottit contre lui. Un bâtiment de béton sortait du désert, le niveau du sol ne comportait pas de porte, mais une multitude d’entrées rectangulaires situées à un mètre du sol. Un vestige des temps oubliés de l’homme. Une pancarte, récente si l’on en croyait son état, Joe’s Shop ornait la face Ouest de l’immeuble enfoui dans le sable. Le toît, lui, était équipé d’étranges antennes métalliques qui devaient trouver, dans le passé, une utilisation autre que celle qui leur était destinée à présent, plusieurs corps se décomposaient, empalés et laissant pendre leurs entrailles au gré des vents du désert.

Ils vérifièrent l’état de leurs armes et s’avancèrent vers la bâtisse. C’est un jeune homme d’une vingtaine d’année qui les attendait au rebord d’une fenêtre-porte, une chemisette blanche, des lunettes de soleil énormes, la moitié du crâne rasé, il crachait de la fumée qu’il semblait aspirer d’un petit os blanc tout en balançant sa jambe droite de gauche a droite.
Ils restèrent quelques seconde à ne rien dire, ne sachant pas comment se comporter devant le première être humain qu’ils croisaient hors de ce qui fut leur abri
«- A vos jolies ptites gueules j’ dirais que z’êtes pas du coin, j’ me trompe ?
- Non du tout, nous venons de l’abri 39, vous êtes la première personne que nous rencontrons depuis notre sortie…
- Des habitants d’un abri. On va pouvoir faire du troc vous et moi, de l’échange de très bonne qualité, il vend pas de la merde le Joe, allez entrez »
Ils le suivirent dans l’immeuble, les mus craquelés et sales renfermaient toute sorte de choses, bouteilles de Nuke~Cola, vieux livres, cuvette de WC fendu, meubles cassés et autres objets insignifiants qui font le charme de ces bazars dégueulasses. L’homme qui se faisait appeler Joe se plaça derrière un comptoir et les fixa.
« - Est-ce que vous avez déjà vu d’autres hommes à part nous deux ?
- Nan connasse.. T’es la première que je vois et je tenais c’te zone de libre échange juste pour m’amuser.. faut aller 40 km au sud pour trouver une ville, elle est relativement sûre un léger sourire déchira son visage.
- Vous avez un purificateur d’eau ici ? Joe dévisagea Wilhelm
- Un quoi ? Ca doit faire trois ans que j’ai plus bu une goutte de flotte, du Nuke~Cola il y qu’ ça de vrai.
- Nuke~Cola ? C’est pas nocif pour les dents ? » Laura afficha ce petit rictus sadique qui faisait tout son charme.
Joe sortit de la pièce et revint quelques secondes plus tard, verre de liquide noir et gazeux en main.
« J’vous offre les verres, va dire que c’est mon action marketing » Il passa les mains sur son crâne, repoussant la moitié de cheveux qu’il lui restait sur la gauche.
Laura but son verre d’une traite, Wilhelm but quelques gorgées, juste assez pour voir sa sœur d’écrouler devant lui, il n’eut le temps que d’écarquiller et de porter les mains à son fusil avant de sombrer lui aussi.

C’est allongé devant le comptoir que Wilhelm se réveilla, débarrassé de son sac et de ses armes. Il se leva sans trop de peine et remarqua leurs affaires jetées dans le fouillis ambiant. Il se félicita intérieurement de n’avoir que « dégusté » ce Nuke~Cola. Un bruit sourd venait de lui lever les yeux au plafond. Il ramassa son revolver et vérifia le chargeur. Joe devait être sûr de l’efficacité de sa boisson pour le laisser ainsi. C’est avec la plus grande discrétion qu’il monta à l’étage. Le revolver levé au niveau de la tête, il longeait les murs et s’approcha de la pièce qui devait être l’origine des bruits.
Sa sœur était à moitié nue, Joe était complètement déshabillé, l’arme déjà prête à tirer. Wilhelm fit un pas de côté et tendit son revolver.

« Ne t’approche pas d’elle ! »

Joe se retourna vers Wilhelm, il eut juste le temps d’ouvrir la bouche avant de se prendre une balle dans le genou.

« Merde putain.. aaah tu devais être hors service pour trois heures au moins »

Wilhelm s’approcha de lui en le pointant en permanence de son arme.

« C’est la journée des surprises pour tout le monde alors »

Une fossette se creusa au coin de la bouche de Wilhelm lorsqu’il logea une balle dans le bras de Joe, celui-ci porta sa main à la blessure. Wilhelm ne put retenir sa botte qui écrasa cette main qui avait failli toucher sa sœur. Il la retira quand les cris de douleur du vendeur furent interrompus par des flots de sang qui lui sortaient de la bouche, il allait le maintenir en vie jusqu’au réveil de sa moitié.

Laura se réveilla deux heures plus tard, son frère était assis à coté d’elle, pointant son revolver sur ce qui restait d’un Joe nu et dégoulinant de sang. Elle porta le regarde sur son propre buste et vit qu’il était dénudé.

« Qu’est ce qu’il s’est passé ? » Un éclair d’horreur traversa ses yeux »
« Heureusement rien.. Je suis arrivé avant qu’il ne commence, j’ai gaspillé déjà deux balle pour lui Il posa une machette trouvée dans le débardas sur le rebord du lit Je t’attends en bas.. »

Des vêtements crasseux, mais qui paraissaient plus adéquats, couvraient leurs combinaisons de l’abri lorsqu’ils quittèrent leur première rencontre civilisée. Laura cachait désormais ses attributs de femmes sous ces couches protectrices, ils pouvaient passer pour deux frères. Ils avaient ramassé une caissette contenant des capsules, ce qu’ils avaient considéré comme étant la monnaie en cours, ainsi que de quoi survivre pour une marche de 40km à travers un désert qui commençait à se révéler des plus inhospitaliers.

Le corps de Joe avait rejoint les autres pantins démembrés sur son toit, des charognards picoraient le sexe à demi mâché qui lui sortait de la bouche.

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