Démarrage
7688832 |
Verset 8 : Dum Spiro, Spero Jusque là, j’avais évolué dans cet univers délabré, ce mélange subtile de bidonville brésilien, de zone industrielle abandonnée allemande, de cité ouvrière turque, de Guernica sous Franco, de Belgrade sous Milosevic, de Moscou après la chute du communisme ou du Bronx avant la fin du capitalisme. Bref, un endroit où le mot ruine désigne aussi bien les Hommes que les murs, et où la chaleur provient plus du canon de votre arme que de celui qui vient d’en faire les frais. Comprenez alors ma surprise de retrouver la couleur, passer du gris des immeubles et du rouge sur mes ennemis au bleu du ciel et au vert des champs devant moi. En effet, aussi improbable que cela puisse paraître, le ciel était dégagé de tout squelette métallique ou lambeau de gratte-ciel, et au sol de longues herbes montant parfois jusqu’à la taille frissonnaient jusqu’à perte de vue. Je m’attendais à entendre Tagazok derrière moi, mais je dus me rendre à l’évidence : ce petit paradis existait. Je me mis faire quelques pas. Je commençais à reprendre mes esprits, mais cet endroit m’intriguait. La végétation pouvait, en théorie, avoir pris le pas sur la ville, mais pas sur une surface aussi étendue. Grands espaces, petits bois denses, étendues d’eaux. Je commençais à me demander si un milliardaire n’avait pas fait construire ce terrain pour ses loisirs, la chasse certainement, les riches de ce beau pays étaient en général tous des fuckin’ assholes, comme le disaient les pauvres qui auraient aimé faire de même. Nixon, George Bush, Charlton Eston, tous ces grands noms aimaient s’amuser en massacrant les populations Vietnamiennes, Irakiennes ou en poussant les américains moyens à vaincre la surpopulation en adhérant à la NRA… Ces sombres pensées furent vites submergées par l’idyllisme dans lequel je progressais. Après une demi heure de marche, je me trouvais en haut d’une colline elle aussi verdoyante. Je m’apprêtais à imiter le générique de la petite maison dans la prairie pour la troisième fois, lorsque mon pied buta. J’écartai les herbes et découvrit un crâne. Humain. Trop petit, malheureusement, pour être celui d’un adulte. Pas de doute, la guerre était bien passée par là. En regardant mieux, je retrouvai ses petits os éparpillés autour. Puis le cadavre d’un ours en peluche. Les yeux arrachés, le dos éventré, la mousse grouillante d’insectes et de vers. Une victime de plus. Je reculai un peu, m’apprêtant à partir, lorsque le sol se déroba sous mes pieds. M’accrochant ça et là à la végétation, je limitai ma chute, et roulai sur quelque chose de dur. Une voie ferrée ; et la colline sur laquelle j’étais était percée par un tunnel dont l’autre bout n’était pas visible. J’entrai. Je fis une dizaine de mètres en profitant de la luminosité faiblissante provenant de l’extérieur. Au-delà d’un tournant du tunnel, je vis une autre clarté. Je continuai donc en tâtonnant, sentant des frôlements sur mes jambes, voyant des petits yeux rouges disparaître en poussant de petits cris stridents. Saloperies ; si je me faisais mordre, j’allais attraper tous les virus du coin. J’arrivai à la source lumineuse. Elle clignotait, sans doute alimentée par un panneau solaire défectueux. C’était une lampe de secours d’une gare de métro, sur les rails de laquelle je me trouvais. Les quais étaient aussi hauts que moi, je dus escalader pour monter dessus. Ma main toucha quelque chose de soyeux. Je pensai d’abord à un rat. Je m’aidai donc seulement du rebord pour me hisser. Une fois debout, je regardai à mes pieds ce qui m’avait intrigué. La lampe éclairant par intermittences, je ne voulus pas comprendre tout de suite. Un cadavre. Aux trois quarts décomposé, seuls quelques cheveux persistaient sur le crâne, des morceaux de tissu, de chair sur les os. Un rat s’enfuit de sa cage thoracique. Il était appuyé sur un autre cadavre, qui avait encore un résidu d’œil, à moitié couché sur un autre, tout autant décomposé. Je compris alors que ce que j’avais pris pour un éboulis, qui s’étendait de mes pieds au mur de la station, n’était autre qu’une masse cadavérique, des dizaines de corps, des pantins lugubres dont certains avaient encore des lambeaux de peau sur le visage, de la chair entre les os des doigts, des masses organiques derrière les côtes. A d’autres manquaient un os, une jambe, une mâchoire ou un crâne. Ça et là un corps bougeait encore, contribuant à la survivance de quelque rongeur. Ici, une mère tenant son bébé dont la tête était à ses pieds, le petit corps, verdâtre, les yeux de sa mère, vides. Là, deux restes humains enlacés ; à côté, un squelette d’enfant qui n’avait jamais du connaître l’amour, même pas de ses parents, abandonné qu’il était. Tout ce tableau macabre aperçu plus que vu par le flash clignotant de la lampe. J’étais dans un état lamentable. Je ne pouvais rester dans cet endroit, mais il n’était pas question de revenir dans le tunnel, et je n’osais monter les escaliers de la station pour revenir à la surface. Je crois pourtant que c’est ce que je fis. Je couru, glissai sur quelque chose non identifié, vomis et finalement arrivai à la surface. Sans regarder autour de moi je sautai à travers une vitre et me retrouvais dans le parc. En sang, je vomis une seconde fois, et une troisième. Puis je m’évanouis. J’émergeai lentement ; je me trouvais dans un environnement qui ressemblait à un tepee indien, sauf que la case avait un toit, aussi plat que le permet une toile. J’étais sur un lit fait de branches et de liens, un matelas de feuillage, et protégé par une couverture de laine qui n’avait vraisemblablement pas connu les manufactures. Je me sentais bien et ne voulais bouger. Toutes mes blessures, au corps et à l’âme, semblaient lointaines. Je pouvais voir devant moi une table faite de la même manière que ma couche, sur laquelle des pots et vases laissaient échapper des odeurs inconnues. Une clarté vive submergea celle de la lampe à huile accrochée à une branche du plafond, puis disparut. Une femme assez âgée venait d’entrer. Elle tâta mon pouls et me parla doucement : « Bonjour. Je crois que vous allez mieux. Vous allez pouvoir quitter l’infirmerie et aller sous la tente réservée aux hôtes. » Elle sortit. Je me levai doucement et fut étonné de ne sentir aucune douleur en faisant mes premiers pas. J’allai à la petite table et découvrit de nombreuses liqueurs et pâtes médicinales. J’entrebâillai la toile qui protégeait l’entrée, et après un temps d’adaptation, je vis le village dans lequel je me trouvais. De nombreuses cases identiques à celle dont je sortais, igloos de branches recouverts de peaux de bêtes, quelques villageois, différents animaux en liberté, et mon hôtesse qui m’attendait. Je la suivis. Les indigènes m’étaient indifférents ; on en distinguait deux groupes : les plus vieux, de trente à cinquante ans, avaient en général des habits faits en peaux, et auraient pu s’adapter à notre société. Les plus jeunes, par contre, avaient pour la plupart le crâne rasé, des tatouages sur tout le corps, et se limitaient pour vêtements à un pagne et un collier de crocs ou autre bijou en os. J’entrai sous une tente un peu plus grande que les autres, précédé de ma guide. En nous voyant, un homme occupé à ronger un os à pleines dents s’arrêta et s’essuya la bouche avec son bras. Notre hôtesse eut une moue de dégoût mais ne dit rien. « Mangez vous aussi. Il vous faudra partir, demain à l’aube. Nous vous accompagnerons jusqu’à votre monde et vous retournerez dans les ombres. » Elle s’apprêtait à partir quand je l’interrompis.
« Mais qui êtes vous ? Ne puis-je pas rester un peu plus ?
- Nous n’appartenons pas aux mêmes mondes. Vous appartenez au passé, vous vous êtes vous-même détruits, et vous allez peu à peu disparaître. Nous avons compris le message de la nature, et nous vivons en osmose avec elle. Dehors il y a un équilibre, aussi bien au niveau des vies que des esprits. Vous mangeriez trop – elle regarda mon compagnon – rompant le premier, et pervertiriez les esprits de nos jeunes, perturbant le second. Vous allez donc rentrer chez vous. « Kurdy Malloy, et toi ? » Mon compagnon m’avait sorti de mes pensées. Un visage narquois, qui semblait avoir connu les coups durs, des cheveux roux qui se terminaient en une petite tresse sur sa nuque. Il était couché sur un lit semblable à celui que j’avais connu, mâchonnant un brin d’herbe. Il avait un casque sur la tête, que je ne le vis que rarement enlever, un manteau de fourrure sans manches. Il m’expliqua qu’il était venu ici pour chercher protection et perdre des gens qui ne lui voulaient pas que du bien. « Cette salope a racontée que je l’avais violée. Elle avait certes pas dit non, mais quand elle a su que j’allais quoi qu’il arrive m’en aller, je crois qu’elle l’a pas très bien pris. Ha ! Sacrée Julia ! Obligé de passer deux semaines chez ces timbrés, jusqu’à ce que ses frères pensent qu’ils étaient cannibales et me laissent pour morts. Ha, je rigole bien. » Il n’avait pas besoin d’en dire plus pour qu’on puisse le cerner. Le lendemain, je partis donc avec Kurdy, nouveau compagnon de voyage. On lui avait rendu sa mule, Erza, qui transportait son matériel. Il sembla heureux de retrouver son Colt. Voyant que j’étais sans arme, ayant perdu mon 10mm lors de ma seconde chute, il me tendit un pistolet bizarre. « L’autre fois, je venais de semer cette fripouille de Stonebridge, et je me suis rendu compte que je m’étais perdu dans cette satanée ville. Je me suis arrêté à un stand, le gars vendait des brochettes d’iguane. Iguana bob, qu’il s’appelait. Il devait avoir une sacrée recette, parce que j’en avais déjà mangé et c’était vraiment pas aussi bon. Bref, je vois un gus qui m’observe derrière un pan de mur, je m’approche et je lui jette un bout, en échange d’une information. Mais au lieu de m’aider il me demande encore plus. Il s’était fait virer de chez lui, une petite ferme isolée, par un gang. J’avais rien à faire, alors pourquoi pas aller nettoyer tout ça. Depuis la grande lessive, y’a plus de bons samaritains comme moi. Tu parles ! Je m’approche doucement, je vois le tableau, son gang, ils ont jamais vu une arme à feu. Un cocktail Molotov à travers la fenêtre, un peu de tir au pigeon sur les fuyards, et on les reverra pas. J’ai revu le gars, tout heureux même s’il fallait reconstruire sa ferme, il m’a filé ce truc. Il a fabriqué ce flingue à partir d’une carabine. ‘fin ça vaut pas un bon vieux revolver. » L’arme, lourde et qui semblait en effet artisanale, utilisait du calibre .223, et se révéla avoir gardé la précision et la puissance de celle qui l’avait engendrée. Kurdy n’avait nulle part où aller ; je lui proposai de venir avec moi rejoindre les Eye Bursters. Le nom et l’idée lui plurent. Je lui parlai d’une grande tour, pas très loin de notre bastion. Il semblait connaître. « C’est le WTCF. Le Wolrd Trade Center – Freedom. Ils l’avaient reconstruit sur d’anciennes ruines, et il devait résister au crash de plusieurs avions. ‘z’avaient des idées bizarres mais ça a résisté aux bombes. Quant au freedom, c’était devenu un symbole national. Grâce à ça ils ont attaqué les producteurs de drogue d’Europe de l’est, puis les Arabes qui gardaient leur carburant au chaud depuis quelques années sans pouvoir l’exploiter. Ils ont même voulu attaquer la Norvège pour son pétrole, en prétextant les libérer de leur monarchie, mais il fallait aussi attaquer l’Angleterre qui avait la même. Ça ne posait à priori pas de problème, mais il fallait plus de temps pour préparer le conflit diplomatiquement, mais la guerre a été déclarée et l’Europe réduite en désert radioactif avant qu’ils ne puissent participer. » Kurdy avait toujours une anecdote amusante à raconter. Je finis par reconnaître le terrain, et nous arrivâmes devant le bastion. Soulagé, je reconnus Chico et Herbert qui montaient la garde ; ils n’avaient pas été décimés entre temps. Exténué, mais néanmoins accueillis en héros, je fus mené à ma chambre et Python, puis Kurts, vinrent me voir pour me dire combien je les avais inquiété. Puis ils sortirent en me recommandant de me reposer. Quelques instants plus tard, Mina frappa doucement et entra. Elle était vêtue d'un vêtement étrange que je ne distinguai pas bien ; il descendait jusqu’à ses chevilles et semblait tenir de la robe et de la cape. Elle ne semblait pas en pleine forme, mais je fus néanmoins très content de la voir. Elle vint directement s'asseoir à genoux sur mon lit, à califourchon sur mes jambes. Elle semblait sur le point de pleurer. « Depuis un mois je ne touche plus à personne, je me réserve comme tu le voulais, enfin comme tu m'as reproché.. de ne pas être.. Enfin, tu comprends, et toi... Toi, tu ne me regardes même pas. Et au moment où je suis prête à craquer, tu disparais... Pourquoi? Je... je... » Elle sembla prononcer quelque chose d'inaudible puis abandonna. Elle porta une main à son col, dégrafa un bouton, et sa cape tomba derrière ses épaules, révélant sa nudité. Elle attendait, là, à cheval au dessus de moi, nue, la poitrine gonflée, les yeux perlant de tristesse contenue et d'espoir, tandis que je ne savais quoi dire. Devant mon aphasie, elle écouta le vieil adage, et m’imposa mon consentement. Elle me prit la main droite et la posa sur son sein. Ils étaient fermes et doux, son cœur battait fort. Je caressai doucement la peau de son flanc; elle était chaude, mais frissonna. Je descendis ma main jusqu'a l'extérieur de sa cuisse, me relevai un peu et l'embrassai. Ce fut presque un effleurement. Elle se releva un peu et je la pénétrai doucement.
C'était ma première fois, et je crois que pour elle, en quelques sortes, ce le fut également.
|
Fallout Fallout2 F. Tactics
Hébergeur: |
Webmasterisé par Sylvanor Toute reproduction interdite sans autorisation. |